Wednesday 14 November 2012

Lolita d'avant

J'ai récemment lu pas mal d'articles sur les blogs d'autres Lolitas gravitant autour du même sujet : "Le Lolita est-il en train de perdre son âme, et il y a-t-il encore une place pour les Lifestyle Lolitas dans la communauté ?" Comme c'est plus intéressant que le post que je prévoyais et que ça me permettra d'être - presque - à la page, je me lance aussi.


Dan Hiller


Pour reprendre une question que se sont posée plusieurs des Lolitas dont je lis les blogs, "Le Lolita a-t-il, ces dernières années, perdu de son esprit ?" Je ne pense pas que ce soit le cas.
Comme j'en discutais tout dernièrement par commentaires interposés avec Hanako, je fais partie de ceux qui considèrent que le Lolita n'a pas d'origine spirituelle définie. On attribue beaucoup de bases idéologiques au Lolita : "à la base, le Lolita est un mouvement féministe", "à la base, le Lolita est né d'un rejet de la société matérialiste", "à la base, le Lolita est un retour aux valeurs de la politesse et de la modesty". Cependant, si on revient à ses origines "historiques", le Lolita est simplement une conception esthétique caractérisée par une silhouette et des codes visuels reconnaissables.
Certes, Novala Takemoto a très rapidement encensé les Lolitas comme des martyrs, d'autres sont venus et ont attribué au style des significations différentes ; il n'en demeure pas moins que toute idéologie appliquée au Lolita ne peut l'être qu'a posteriori.

Cela veut-il dire que, selon moi, le Lolita est vide de sens ? Absolument pas. Je suis la première à m'auto-qualifier de Lifestyle Lolita, et je comprends tout à fait ceux qui affirment que selon eux, le Lolita touche à quelque chose qui est bien au-delà des vêtements. Le fait que l'idée ait été attribuée au style par la suite ne la rend pas moins intéressante - cependant, gardons à l'esprit qu'elle n'est pas l'idée primordiale. Il n'est pas de conception du Lolita qui soit plus vraie qu'une autre, et en ça, je pense sincèrement que le Lolita est une mode sans-idéologie-fixe.

 
Je me reconnais tout à fait dans le portrait de ces Lolitas "de la vieille école" (toutes ces histoires d'ancienneté étant bien entendu relatives, on se sent "ancien" à partir du moment où on réalise que les choses ont changé) qui ont été un peu larguées par le tournant que le style a pris.
Ce n'est pas de la faute des autres, cependant, si leur vision esthétique ou morale du Lolita est populaire.

Et dans un sens, il y a encore des Lolitas qui partagent leur style Old School sur les blogs, encore des Lolitas qui revendiquent le Lifestyle, si bien que j'ai du mal à me dire qu'une partie du Lolita tel qu'il avait été construit a été effacée.

C'est pourquoi il est injuste, selon moi, d'affirmer que le Lolita a perdu ses valeurs. Il est parti de quelque chose qui n'avait pas de signification déterminée, et, peut-être justement du fait de cette tabula rasa, a gagné beaucoup des différentes personnes qui l'ont porté.

NB : Concernant les articles d'autres Lolitas que j'évoquais, ceux-ci ne se limitaient absolument pas à cette notion d'idéologie dans leur contenu, et personne n'a accusé qui que ce soit de corrompre le Lolita.

4 comments:

  1. Je me retrouve beaucoup dans ton post. Quand je vois les gens se plaindre que le lolita "bah c'est plus c'que c'était ma p'tite dame" je ne comprends pas trop car je n'ai jamais vu le lolita comme uniforme et figé.
    D'aussi loin que je me souvienne, il y a toujours eu des gens pour qui ça n'était qu'une mode, juste des vêtments et d'autre pour qui c'était plus que ça.

    En fait, je pense que l'erreur c'est de vouloir à tout prix donner une définition parfaite du Lolita, car selon moi il n'y en a pas. Chacun a son approche et sa vision de la chose, chacun y apporte ses propres envies et vit le lolita à sa façon. Avec une communauté aussi grande et hétérogène, il est normal qu'on ne puisse pas rassembler tout le monde par des valeurs identiques.

    Je me considère comme lolita, life style même alors que pourtant je ne porte que peu de robes/jupes lolita et que lorsque je le fais, je ne m'encombre pas de règles ou autre. Pourtant je ne sens pas moins "légitime" pour autant. Lorsque je vois une lolita sobre et élégante a coté d'une sweet OTT full AP, je ne me dis pas qu'il y a une bonne/vraie et une mauvaise/fausse lolita.
    Il y a des styles que j'apprécie plus que d'autres évidement, certains que je déteste, mais à mes yeux ils font tous parti du paysage lolita même si ils ne correspondent pas à la vision que j'en ai.

    J'ai l'impression de partir un peu dans le hors sujet mais j'ai trouvé ton article tellement en accord avec ma façon de voir le lolita que j'ai eu envie de réagir.

    ReplyDelete
    Replies
    1. (Oh, super, tu as un blog !)

      Je suis assez d'accord avec ton premier point ; je ne l'avais pas mentionné dans l'article, parce qu'en fin de compte je n'ai jamais suivi de près que les communautés internet et ne sais pas ce que racontent les gens IRL, mais il me semble bien que depuis des années, certains considèrent le Lolita comme un mode de vie, et d'autres comme une mode tout court. Ce n'est pas quelque chose qui nous est tombé dessus récemment.

      Je te seconde également dans ton deuxième argument : j'ai mes préférences personnelles, et en un sens, j'irai jusqu'à dire que le OTT a changé les codes du Lolita d'une manière qui ne me plait pas trop esthétiquement. Ca ne veut pas dire pour autant que je le considère comme "moins Lolita" qu'un autre sous-style.

      Bonne journée !

      Delete
  2. Bonjour Neyrelle !

    Je suis d'accord avec toi pour dire que l'idéologie applicable au lolita, si idéologie il y a, ne peut-être appliquée qu'à postériori. Pour ma part je ne pense pas qu'il en existe véritablement une, en revanche je crois sincèrement que le lolita peut être assimilable à un courant, un mouvement esthétique sinon artistique, de par les codes visuels qui fondent ses origines. En tant que mouvement il brasse des opinions, des conceptions artistiques et spirituelles différentes, ce qui fait qu'il ne peut être figé. Je pense que je te rejoins sur ces points-là.

    Mon problème en fait, c'est que certains codes visuels et culturels ont tellement dérivé que je me demande s'ils font encore partie du lolita. Lorsqu'un peintre ne se reconnaît plus dans un courant pictural, il lui est difficile de dire qu'il en fait encore partie, et alors il crée le sien. L'opposition entre ancien et moderne a toujours conduit à la naissance de nouvelles idées, pourquoi ne pas les affirmer autrement qu'en les enfermant dans un carcan qui n'est pas vraiment le leur ?
    Ce qui me désole, c'est à quel point le débat devient stérile entre celles qui tapent sur les autres en leur disant qu'elles ne méritent pas le statut de lolita, et les autres qui leur répondent en les traitant de grand-mères aigries. Finalement, la silhouette, le vêtement, poussent des personnes à s'enfermer dans de nouvelles cases. Pour moi, s'habiller ou non en lolita est un geste de liberté, qui revient à s'affirmer soi-même par le vêtement. Et à force de chercher la petite bête, et bien il n'y a plus rien.
    C'est pourquoi, ces derniers temps, je m'interroge sincèrement sur une sorte de spectre commun, d'idéaux qui s'expriment par l'esthétique du lolita, et qui ne cantonnerait pas chaque style dans une case sans retour en arrière possible. Je m'interroge aussi parce que j'ai l'impression d'être dépassée par l'évolution des codes et des comportements. Je suis triste de voir des gens que j'aime s'éloigner du lolita par honte du vide qui naît de la dispute exempte d'arguments.

    Le mouvement est créateur, mais je ne crois pas qu'en tant qu'être pensants l'on puisse se contenter de créer aveuglément. C'est à peu près là où j'en suis, dans cette réflexion.
    En tout cas, je te remercie d'écrire des articles aussi intéressants, c'est toujours un plaisir de lire des avis un peu différents des siens.

    Passe une bonne journée !

    ReplyDelete
    Replies
    1. Hello !

      Pour reprendre ton analogie, les distinctions entre mouvements dans le cadre des beaux-arts me paraissent tout aussi arbitraires que celles qui séparent les différents sous-styles Lolita. Nous les acceptons davantage comme inscrites dans la pierre parce que des experts ont consacré leur vie à les étudier, mais au final, lorsque l’on se rapproche des limites, savoir si tel groupe s’inscrit dans un mouvement antérieur demeure sujet au débat. Ces groupes, ainsi que dans le Lolita, ne sont pas nécessairement fondés autour d’un manifeste de critères visuels, idéologiques ou culturels. Der Blaue Reiter, par exemple, s’est formé parce que personne ne savait où exposer les peintures de Kandinsky. Ceux qui identifiaient de manière subjective leur travail au sien l’on rejoint. Pourtant, Franz Marc est bien plus figuratif dans ses toiles. On peut arguer à ce titre que, bien qu'ils fassent partie du même mouvement, leur œuvre est fondamentalement trop différente pour constituer une catégorie. De même, certains considèrent qu'ils se rejoignaient autour de valeurs communes, et que leurs peintures peuvent donc être interprétées comme étant similaires.

      Cela étant dit, je te rejoins dans l’idée que le Lolita tel qu’il est conçu maintenant est beaucoup plus flexible dans ses codes qu’il ne l’était auparavant, mais ce nouveau Lolita est-il suffisamment « différent » pour constituer un mouvement distinct ? Ce n’est pas le peintre qui ne se reconnait plus dans un courant qui en crée un, puisque par définition, ce courant est préexistant. C’est le peintre dont on ne reconnait pas le style qui invente, et c’est justement ce « dont on ne reconnait pas le style » qui est problématique. Parce que tout ça dépend de facteurs sociaux, culturels, géographiques et tutti quanti qu’il est difficile d’analyser.
      Il y a-t-il plusieurs « Lolita », donc ? Je n’ai pas de réponse. A l’heure qu’il est, je suis assez partisane du « wait and see » : Le OTT (j'évoque par là tous les OTT et non uniquement le OTT Sweet), par exemple, est communément défini comme sous-style Lolita, parce qu’il reprend ses codes de base et gravite autour des mêmes marques. Nous ignorons encore, cependant, s’il évoluera ou non à contresens du Lolita. De ce fait je pense que le style est encore trop jeune pour déterminer quoi que ce soit. Si séparation il doit y avoir, elle se fera.


      Quant au spectre commun d’idéaux, c’est une chose à laquelle je réfléchis encore, et si je n’ai pas d’idée marquée sur la question, j’ai beaucoup aimé ton article.

      Merci pour le commentaire, je te retourne le compliment.

      Delete